De Meyrueis à Castelnaudary
Mercredi 04 Avril
Meyrueis => Revens
Pour quitter Meyrueis et prendre la direction des causses, il nous faut d'abord sortir du creux de vallée dans lequel se trouve ce village.
Une fois arrivées sur le Causse Noir, on file vers le sud-ouest. Les nuages sont très présents, et il fait froid. C'est un peu dur de repenser aux températures estivales de la semaine dernière, par rapport au temps qu'on a maintenant. J'ai ressorti tout l'attirail que j'avais cet hiver, plusieurs couches de pulls, les gants, la cagoule polaire... quand il y a 10 jours je me baignais dans l'Ardèche ! Les juments aussi doivent accuser le coup : elles ont perdu tout leur poil d'hiver au début du voyage, et il va leur falloir d'autant plus d'énergie (et donc d'aliment) maintenant pour lutter contre cette météo peu clémente. Pas de chance pour nous, le centre qui nous a accueilli hier n'avait plus de grain et n'a pas pu en ravoir, on est donc reparti broncouille (si,si...), à part un reste de granulés qu'ils nous ont très gentiment dépanné. Je me suis arrêtée cette après-midi à « Randal's Bison », une ferme d'élevage de bisons, vaches et chevaux. Le but était d'acheter un peu de grain et, là encore, rupture de stock. On aura quand même vu des bisons et ça, c'est la classe [j'étais très fière de mes deux nénettes, pas du tout effrayées par ces grosses bêtes bizarres, au contraire elles avaient l'air d'avoir envie de tâter du tri du bétail ! (une des activités de cette ferme)].
Ce causse est assez vert, surtout dans la partie nord, et j'étais assez étonnée de voir le nombre d'hectares de prairies cultivées, notamment beaucoup de luzerne. Il doit faire froid ici l'hiver, et les piquets au bord des routes témoignent d'une abondance de neige, tout comme les toits montagnards.
Et oui, ça y est, on est dans le Gard (encore!). C'est rigolo, dans le peu de villages que j'ai traversés aujourd'hui, j'ai vu pas mal de signes qui montrent un certain attachement au bas-gard, comme plusieurs croix de Camargue apposées sur les maisons. Au niveau climat et paysage on en est pourtant loin ! Enfin pas tant que ça en fait au niveau paysage, puisqu'ici plus de forêt : cailloux et arbustes sont la règle. Par contre il n'y a pas un seul filet d'eau sur tout le causse.
Nous sommes arrivées assez tôt à Revens, dernier village avant de descendre du causse. Et là un sympathique GARDOIS (^^) m'a proposé un de ses prés pour bivouaquer : pour une fois ces jours-ci, l'herbe est belle et on est bien placées, juste à côté de l'église (et du cimetière donc!). Mais pas de souci, la tente est toujours équipée de son ''catchdream'' (cf tour de rodage de cet hiver).
Le village de Revens, on a bivouaqué sur le seul endroit vert qu'on voit sur la photo, sous l'église.
Le propriétaire du pré est un gros éleveur de brebis, puisqu'avec des associés, ils ont 400 brebis allaitantes (pour la viande) et 900 laitières ! 2500 litres de lait par jour, c'est le second producteur de lait pour le roquefort Société, qui semble beaucoup s'approvisionner parmi les éleveurs de la région, j'ai croisé aujourd'hui un des camions de la marque qui venaient chercher le lait d'une autre ferme.
La discussion, une fois de plus avec un éleveur, tourne autour du prix du foin, qui atteint des sommets avec les années de sécheresse qui viennent de s'écouler : hier on m'a quand même parlé d'un foin de base à 350€ la tonne. Ça ne parlera peut-être pas à grand monde, mais c'est cher, très cher. Il y a 4 ans, je touchais du foin de Montfavet (qualité ++) à 200€ la tonne. Tiens, d'ailleurs, ici ils font venir leur foin de La Crau, ça fait un petit lien avec le sud de la région... Bref, cet éleveur va arrêter une partie de son activité, il y a quelques jours un éleveur d'Aubrac me disait qu'il avait du faire partir une bonne partie de son troupeau pour la même raison...
Voilà, ici le JT de Jean-Pierre Pernaud en direct du Causse Noir ! ^^
Plus sérieusement, cette crise peut peut-être devenir un mal pour un bien : revenir à un mode de production moins intensif, avec moins de bêtes, des races plus adaptées aux régions d'élevage et un système de vente des produits en circuit court serait sûrement une bonne solution...
Jeudi 05 Avril
Revens => Ste Eulalie sur Cernon (Bengouzal)
De bon matin nous descendons du Causse Noir, traversons la Dourbie et sa très étroite vallée et remontons sur le causse d'en face, celui du Larzac.
Départ nuageux avec en face le Causse du Larzac
Plus tard dans la matinée, cette fois c'est le Causse Noir
dont on vient de descendre qu'on voit en face.
Une fois arrivées sur le plateau, on trouve le joli petit village de St Sauveur du Larzac. Après avoir traversé le village, j'aperçois une ferme où il y a aussi quelques chevaux, et je m'y arrête pour voir s'ils ont du grain. Là je rencontre brièvement Muriel, qui était sur le départ mais me propose d'attendre Christian, son compagnon, un éleveur de brebis allaitantes. C'est un des pionniers de la lutte du Larzac, la rencontre était particulièrement enrichissante. Je repars ravie, avec une adresse pour le soir et la mule chargée de granulés (garantis sans OGM s'il vous plaît : héhé, vive le Larzac !).
La traversée de ce causse est agréable, et j'arrive le soir à Bengouzal, sur la commune de Ste Eulalie sur Cernon, chez un autre couple d'éleveur de brebis allaitantes.
Vendredi 06 Avril
Ste Eulalie sur Cernon (Bengouzal) => St Félix de Sorgues
La journée est pluvieuse, mais les chemins que l'on emprunte sont jolis.
On descend du causse pour rejoindre en fin de journée la vallée de la Sorgues.
Samedi 07 Avril
St Félix de Sorgues => Camarès
On remonte maintenant vers Sylvanès, où se trouve une belle abbaye cistercienne du XIIème siècle, puis on redescend vers Camarès. La région regorge de sources, certaines captées pour la consommation, d'autres utilisées pour leurs propriétés bienfaisantes, comme en témoigne par exemple les bains de Sylvanès. Ces thermes ont été construits par les moines en même temps que l'abbaye, mais l'activité a été arrêtée dans les années 40. Ils sont maintenant complètement abandonnés, et l'impression est troublante quand on passe devant.
Une fois arrivée à Camarès, il me faut faire des courses et le seul commerce ouvert est le supermarché de la commune. Forcément on ne passe pas inaperçues avec les juments attachées devant le supermarché, c'est peu commun ! ^^
Je repars pour chercher un endroit pour bivouaquer, un peu fatiguée de la pluie qui ne cesse de tomber, quand un jeune homme passant en voiture s'arrête pour me proposer un bivouac dans une ferme alentour. Il travaille sur un chantier qui construit une maison en paille pour l'éleveur de la ferme en question, Christophe. Celui-ci accepte très gentiment de m'accueillir et met à ma disposition un bout de pré et des sanitaires. Une fois le bivouac monté, me voici enfin à l'abri !
Dimanche 08 Avril
Journée de repos
Le temps est trop mauvais dès le matin, je décide donc de rester là pour la journée. J'en profite pour rencontrer des membres des « Bois de Paille », qui se déplacent dans toute la France pour construire des maisons en paille, notamment sous la forme de chantier participatif. C'est l'occasion pour des bénévoles d'apprendre ces techniques particulières. Voici leur site : http://www.lesboisdepaille.com.
Lundi 09 Avril
Camarès => Lacaune (Le Thyoïs)
Enfin une belle journée ensoleillée, la première depuis pratiquement une semaine, et en plus les petites vallées que je suis entre ces deux villes sont vraiment charmantes, d'une beauté bucolique et sereine.
Les vallées que j'ai suivies durant la journée
Je bivouaque le soir auprès d'un tout petit bâtiment en pierre, c'est la gare de ce hameau que des habitants ont restaurée après qu'elle fut laissée à l'abandon pendant de longues années. Elle a ainsi recouvré une seconde vie, créant un lieu de rencontre pour les résidents et d'accueil pour les gens de passage.
Mardi 10 Avril
Lacaune (Le Thyoïs) => Lamontélarié
Je passe dans Lacaune pour chercher une carte, que je ne trouve pas (pour changer, il n'y a jamais celle que je veux..!). Je pars donc sur les monts de Lacaune en empruntant la petite route qui va en direction du lac de la Raviège. La route est sinueuse, la pluie ne nous laisse pas de répit et pour couronner le tout il y a du brouillard, on ne voit pas à 20 mètres. Je décide donc de m'arrêter en milieu de journée, et installe le bivouac dans une jolie clairière au milieu de la forêt.
Mercredi 11 Avril
Lamontélarié => Sauvergues
Quand j'ouvre les yeux, la pluie tombe toujours, et je ne veux pas préparer les affaires sous la pluie. Je dois donc attendre midi pour qu'une petite accalmie nous permette de décoller.
Nous passons à côté du lac de la Raviège, puis on remonte sur le village d'Anglès, qui se trouve sur le chemin allant d'Arles à St Jacques de Compostelle. On est alors dans le Tarn, et le temps semble vraiment s'être arrêté ici dans les commerces dans lesquels je passe. Les accents aussi sont savoureux.
Je continue ma route le long d'un beau GR qui passe dans la forêt, et tombe sur Agnès, une propriétaire de chevaux qui me proposent de bivouaquer dans un pré qu'elle a au hameau de Sauvergues, juste un peu plus haut. Ce hameau est tout mignon et les habitants très accueillants, et ici aussi certains se sont réunis pour réhabiliter cette fois un ancien four banal. On m'y explique que ce four était un patus, c'est à dire qu'il appartenait à tous les habitants du hameau (ici la définition http://fr.wikipedia.org/wiki/Patus). Il servait de dépotoir depuis longtemps, et certains habitants ont décidé de redonner à ce lieu sa fonction première. Il a fallu l'accord de tous les habitants, mais le projet a finalement été mené à bien, et désormais le four est allumé régulièrement et chacun peut venir y faire son pain, ses pizzas, ses grattins, etc ! Àla belle saison, c'est aussi un lieu convivial autour duquel se réunit le hameau pour faire la fête.
Jeudi 12 Avril
Sauvergues => Aiguefonde
On suit encore le GR qui nous amène jusqu'à Mazamet, ville autrefois très prospère grâce à l'industrie du cuir et le travail de la laine, mais qui n'est plus aujourd'hui le centre industriel qu'elle était. On trouve d'ailleurs dans plusieurs des petites vallées environnantes le vestige de cette époque sous la forme de vieilles usines (foulons, filatures de laine, tanneries, etc).
Arrivée sur Mazamet, avec la Montagne Noire derrière
On y arrive entre midi et deux, et le magasin où je voulais acheter des céréales était fermé. On fait donc une petite pause de midi en plein milieu de la zone commerciale de la ville. Une autre image atypique, mais à partir du moment où l'herbe est belle, les juments ne se formalisent pas de l'environnement urbain.
On traverse la ville en empruntant la ''voie verte'', installée sur le circuit d'une ancienne voie ferrée, qui nous permet d'éviter la circulation. Arrivée dans un village quelques kilomètres plus loin, je demande une idée de terrain pour la nuit, et un gentil retraité me confie alors carrément les clés d'une maison qu'il a dans la forêt et me propose d'y passer la nuit. Je dors donc dans une vieille maisonnette à l'histoire très particulière, au coin d'un bon feu de cheminée. Une dame croisée juste avant m'apporte aussi un panier plein de victuailles. La chaleur de cet accueil est bienvenu : l'orage fait rage cette nuit là, et on est dans un creux de la Montagne Noire, autant dire qu'à l'extérieur les températures sont basses !
Vendredi 13 Avril
Aiguefonde => Bassin du Lampy Neuf
De bon matin, on monte directement dans la Montagne Noire et on suit toute la journée le GR 7 qui la traverse d'est en ouest. Une fois là haut, on se retrouve dans un brouillard à couper au couteau, et ça dure une bonne partie de la journée. Enfin, une fois passées sur la face sud, on aperçoit quelques coins de ciel bleu. Cela faisait des jours que ce n'était pas arrivé !
Sur une des crêtes sur lesquelles on passe, il y a beaucoup de vent et on se retrouve donc juste en dessous d'éoliennes qui tournent, c'est très impressionnant !
Et puis là, au milieu de nulle part et alors que je n'avais croisé que quelques bûcherons dans la journée, j'aperçois de loin des drapeaux de pirates qui claquent au vent. Forcément l'impression est bizarre et je me suis vraiment demandé ce que ça pouvait être. C'était en fait les apparats d'un camion de teufeur, ce fut une rencontre complètement surréaliste !
Je me dirige ensuite vers le barrage du Lampy Neuf, l'endroit est beau et très tranquille, mais j'y arrive passablement énervée : juste avant d'arriver, il nous fallait passer sur le barrage, mais les personnes qui ont fait passer le GR à cet endroit ont omis de penser aux randonneurs à sabots et ont installé des barrières très étroites pour accéder au barrage. Forcément on ne passait pas, et j'ai du galérer à faire passer les juments par des cascades plus bas pour arriver enfin à notre lieu de bivouac.
Samedi 14 Avril
Bassin du Lampy Neuf => St Férréol
Au petit matin, le paysage est magnifique avec la brume qui se lève sur le lac. On reprend le GR qui suit la rigole de la Montagne Noire jusqu'aux Cammazes.
La Montagne Noire est pleine d'eau, et plusieurs des bassins qui s'y trouvent, et cette rigole, alimentent le canal du Midi. Ce canal est l’œuvre de Riquet (au 17ème siècle, époque du Colbertisme) , mais les travaux de ce genre étaient tellement longs et onéreux qu'il n'a pas pu le voir terminé de son vivant. C'est donc Vauban qui a terminé le travail, notamment aux Cammazes où une voûte laissant passer la rigole porte son nom.
Nous bivouaquerons quelques kilomètres plus loin, au bord du bassin de St Férréol.
Dimanche 15 Avril
Jour de repos
Lundi 16 Avril
St Férréol => La Pomarède
Ma famille paternelle vient de cette région, partagée entre l'Aude, la Haute-Garonne et l'Ariège. Comme je profite aussi de ce voyage pour effectuer une sorte de pélerinage aux sources, je me rends au beau village médiéval de la Pomarède où j'ai quelques souvenirs d'enfance. Je suis ensuite accueillie par de la famille qui a une vieille ferme à proximité.
Mardi 17 et Mercredi 18 Avril
Jours de repos
Je profite de ces 2 jours pour acheter de quoi vermifuger les animaux, les traiter contre les tiques aussi (il y en a énormément ces derniers temps), faire ma lessive, etc.
Je me prépare aussi à affronter la pluie qui continue de tomber et qui se transforme en neige dans les proches Pyrénées vers lesquelles je me dirigerai ensuite.